Thon rouge : l’Algérie s’exclut de l’ICAAT


Il y a eu de vifs échanges entre les trois membres de la délégation du ministère de la Pêche et des Ressources halieutiques et le président de la Commission internationale pour la conservation du thon (ICCAT) lors de la réunion de l’intersession qui s’est tenue à Barcelone (Espagne) du 22 au 25 février.


En décembre, le ministère a contesté la recommandation 10-04 de l’assemblée générale de Paris où l’Algérie avait brillé par son absence. Une décision qui ne laissait au quota national que 138 tonnes sur les 616 attribuées en décembre 2009. Selon les règles de l’ICCAT, un pays s’opposant à une recommandation en vigueur n’est plus lié aux obligations de la Commission qui l’exclut de fait de ses pays membres au nombre de 48. A Barcelone, l’argumentaire de l’Algérie, à qui on reprochait également de ne pas avoir fourni à temps des bilans et le plan de campagne 2011, s’est fondé sur une atteinte à la souveraineté nationale. Il aurait dû être plus technique que politique et exploiter à bon escient les nombreuses alternatives de la réglementation. Les déléguées auraient pu demander, comme cela est possible, la réaffectation des 50% du quota de 2009 qui n’ont pas été pêchés, soit 450 tonnes et de fournir dans les délais les documents réclamés à toutes les parties contractantes.

La situation est considérée comme très grave. Les bateaux algériens ne peuvent dorénavant ni coopérer ni se placer sous le contrôle des observateurs de l’ICCAT. Les pays placés dans ces conditions sont montrés du doigt. Aucun n’est autorisé à effectuer un acte de coopération, d’échange ou de commerce. Le thon pêché ne peut être vendu à l’export, sauf avec les pays qui sont dans la même situation au ban de la communauté. Il ne pourra être destiné qu’à la consommation locale. Les représentants du ministère ont encore déclaré que les thoniers algériens, s’il en est, ne pêcheront que dans les eaux de souveraineté. Une déclaration qui a conforté les membres de l’ICCAT dans leur conviction que l’Algérie recherche l’isolement et l’exclusion pour ne pas avoir à reconnaître devant la communauté internationale qu’elle n’a jamais possédé les bateaux pour pêcher par ses propres moyens les centaines de tonnes de thon allouées depuis plus de 15 ans.

Et dans cette perspective, quel est le sort réservé aux vrais thoniers acquis sur fonds propres en 2009 et ceux financés par le plan de relance censés les rejoindre pour constituer la flottille algérienne ? Selon des experts de l’ICCAT, il reste des chances à notre pays de retourner dans le concert des nations qui s’est porté garant pour la conservation et l’exploitation rationnelle d’une ressource halieutique menacée à très court terme. Le ministère pourrait en effet revoir la contestation de la recommandation 10-04 et demander la réaffectation des 450 tonnes de 2009 non pêchées à commencer par une première tranche de 90 tonnes. Cela pourrait débloquer la situation. Il faudrait aussi donner la liste des bateaux et le quota alloué à chacun pour prouver que le tonnage total n’excédera pas les quantités autorisées.
Ceci sans oublier qu’il ne faut pas dépasser le nombre de cinq bateaux pour bénéficier de la pêche conjointe. Il faudra également que les autorités algériennes bougent très vite et fassent une grosse pression diplomatique sur l’ICCAT en recherchant le soutien des membres. Mais le souhait-il vraiment en haut lieu ? Pour beaucoup, le retrait déguisé de l’Algérie à Barcelone, comme l’absence à l’assemblée de Paris en octobre 2010, font partie d’un plan concocté pour ne pas avoir à justifier la vente de centaines de tonnes de thon qui n’ont jamais été réellement pêchées par des bateaux algériens.

En effet, pendant des années et avec la complicité de l’administration centrale, les quotas algériens ont été revendus illicitement, sous forme de papier et jusqu’à 10 fois son prix, à des pilleurs de thon non autorisés par leurs Etats respectifs et par l’ICCAT. Cela a été le cas par exemple en 2007 quand une société écran algérienne a cédé toute sa part à un consortium de fermes d’élevage turques
Slim Sadki
el watan
le 04/03/2011

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