Port de plaisance et de pêche de la Salamandre : les virées familiales interdites

Le port de plaisance et de pêche de la Salamandre peine à trouver ses marques.
Confiée à l’entreprise de gestion des ports de pêche, cette structure avait soulevé un formidable élan d’espoir à la fois pour les professionnels et pour les amateurs de pêche et de loisirs, mais également pour les milliers de vacanciers en provenance des villes de l’intérieur.
Pour ces visiteurs occasionnels, le fait de voir de près les frêles embarcations en polyester, côtoyant les rugissants chalutiers noyés sous leurs cordages, caressant les plats-bords érodés des vieux sardiniers, admirant ces paquets de marins bardés de couleurs rutilantes de leurs vieux cirés, constituait assurément un spectacle original auquel nul n’était habitué. Pas même les plus anciennes familles de Mostaganem, celles dont les grands-parents et les petits-enfants ont toujours fait ce métier si rude et si généreux.
En effet, depuis que l’accès au port a été autorisé, ce sont des grappes de visiteurs qui n’ont eu cesse de déambuler, parfois à des heures tardives de la nuit, sur ces quais devenus si familiers. Au point où des familles, qui n’avaient jamais vu la mer d’aussi près, ont pris un malin plaisir à faire une virée sur les quais poussiéreux de Salamandre. Puis, toute belle chose ayant une fin, l’entrée au port se transformera, l’espace d’un automne balbutiant, en véritable chemin de croix.
Confié dans un premier temps à la police nationale, l’accès vient de passer entre les mains du service des gardes-côtes. Un personnel à la fois avenant et courtois se charge désormais de filtrer les entrées. Mais dans ce remue-ménage dont on ne voit pas la finalité, il y a un dynamique opérateur qui a développé un concept tout à fait nouveau à Mostaganem, celui d’organiser des virées en mer pour les familles, les groupes d’étudiants ou les nouveaux couples.
Une activité qui a fait le bonheur du petit port de Stora, dont des dizaines de sardiniers proposent pour quelques heures une courte croisière au large. Dans cet ancien port phénicien, il n’y plus un seul couple qui n’entreprend ce pèlerinage nautique jusqu’à l’îlot de Scirigina, qui commande l’accès au port de Stora. Pourquoi ce qui est licite et qui se pratique depuis plusieurs décennies à Stora, devient illicite à Salamandre ? D’autant que les familles avaient pris goût à ces balades au large, tel ce couple de septuagénaires à qui leurs enfants offriront de fêter leurs noces d’argent au large.
L’idée a vite fait le tour de la cité, si bien que les demandes affluèrent chez «Pro-mer» qui avait pris soin de se mettre en conformité en se faisant délivrer un registre du commerce en bonne et due forme. Mais cette activité originale et parfaitement légale n’a pas l’air de plaire aux responsables du port de Salamandre qui viennent de neutraliser cet opérateur. Ainsi, l’EGPP, par une simple note d’instruction à l’intention de ses agents de sécurité, vient de tuer dans l’œuf une entreprise qui se préoccupait enfin du bonheur des familles algériennes dont la relation à la mer a toujours relevé du sacré.
Yacine Alim

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